Le législateur adapte le droit interne à la réglementation européenne dans le cadre de la loi DDADUE, qui comporte plusieurs mesures de révision en droit des sociétés et en droit financier.
La loi dite DDADUE 2025 du 30 avril 2025 transpose plusieurs directives européennes dans le champ du droit des sociétés. Elle adapte également le droit interne à des règlements européens récents. Ces dispositions impactent notamment les entreprises cotées et leurs conseils.
L’accès au registre des bénéficiaires effectifs est encadré
Entrée en vigueur le 3 mai 2025, la loi DDADUE 2025 limite l’accès au registre des bénéficiaires effectifs aux personnes démontrant un intérêt légitime à consulter les informations. En outre, elle met à jour de la liste des autorités compétentes pouvant accéder à l’intégralité des données contenues dans ce registre.
Reporting de durabilité : report du calendrier
La loi DDADUE 2025 modifie la réglementation européenne sur le rapport de durabilité (CSRD) [1] transposée en droit français par l’ordonnance n° 2023-1142 du 6 décembre 2023 [2]. Pour mémoire, ce rapport est un outil de communication financière visant à harmoniser et à améliorer le reporting des entreprises sur les questions environnementales, sociales et de gouvernance. L’obligation de publier un rapport de durabilité se trouve donc reportée de deux ans pour les entreprises des deuxième et troisième vagues. Le législateur aligne ainsi le calendrier de mise en œuvre de la CSRD sur le droit européen, permettant aux entreprises concernées de prendre progressivement en main ces obligations de reporting assez contraignantes.
En outre, la loi aménage temporairement le contenu du rapport de durabilité, en prévoyant la possibilité pour les entreprises d’omettre certaines informations. Enfin, elle supprime plusieurs sanctions pénales attachées à la mission de certification des informations en matière de durabilité.
Parité dans les instances de direction : la directive WoB transposée
La loi DDADUE 2025 charge l’Autorité des marchés financiers (AMF) en lien avec le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes (HCE) d’analyser et de veiller au respect des obligations en matière d’égalité hommes-femmes dans les instances dirigeantes. La directive Women on Boards (WoB) [3] de 2022 impose en effet aux entreprises cotées employant plus de 250 salariés et réalisant un chiffre d’affaires de 50 millions d’euros et/ou un total de bilan de 43 millions d’euros, de respecter un certain nombre de quotas de représentation entre les femmes et les hommes dans leurs conseils d’administration. Les données de conformité sur la mixité au sein des conseils d’administration devront être transmise par les sociétés cotées à l’AMF. Cette autorité publiera la liste des sociétés cotées en conformité et la mettra régulièrement à jour.
Obligations vertes : le rôle stratégique de l’AMF
La loi DDADUE 2025 modifie le Code monétaire et financier pour le mettre en conformité avec le règlement européen du 22 novembre 2023 sur les obligations vertes [4], emprunts dédiés au financement des projets contribuant à la transition écologique. Elle intègre dans le CMF les règles relatives aux pouvoirs de contrôle, de surveillance et de sanction de l’AMF.
Exercice du commissariat aux comptes dans plusieurs sociétés
La loi DADDUE 2025 permet l’exercice simultané de la profession de commissaire aux comptes dans plusieurs sociétés dans deux cas spécifiques :
- au sein d’un groupe de sociétés de commissaires aux comptes formé par une société et les sociétés qu’elle contrôle ;
- au sein de deux sociétés de commissaires aux comptes dans le cas où la moitié au moins des associés ou actionnaires de ces sociétés sont communs.
Un régime de nantissement des actifs numériques
Adaptant les dispositions du Code monétaire et financier avec le règlement européen sur le régime pilote [5] et avec le règlement européen MiCA [6], la loi DDADUE 2025 crée un régime de nantissement des actifs numériques.
Une habilitation pour légiférer par voie d’ordonnance sur l’ESAP
La loi DDADUE 2025 confère au Gouvernement une habilitation de neuf mois pour légiférer par voie d’ordonnance afin de modifier le Code de commerce, le Code monétaire et financier, le Code des assurances et, éventuellement, d’autres codes ou lois pour assurer la transposition de la réglementation européenne relative à l’ESAP [7]. Rappelons que la création d’un point d’accès unique européen (ESAP) a pour objectif de procurer à l’échelle de l’UE un accès centralisé aux informations utiles pour les services financiers, les marchés de capitaux et la durabilité.
[1] Directive (UE) 2022/2464 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 modifiant le règlement (UE) no 537/2014 et les directives 2004/109/CE, 2006/43/CE et 2013/34/UE en ce qui concerne la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises, JOUE L 322 du 16 décembre 2022
[2] Ordonnance n° 2023-1142 du 6 décembre 2023 relative à la publication et à la certification d’informations en matière de durabilité et aux obligations environnementales, sociales et de gouvernement d’entreprise des sociétés commerciales, JORF n°0283 du 7 décembre 2023
[3] Directive (EU) 2022/2381 du Parlement européen et du Conseil du 23 novembre 2022 relative à un meilleur équilibre entre les femmes et les hommes parmi les administrateurs des sociétés cotées et à des mesures connexes, JOUE L 315 du 7 décembre 2022
[4] Règlement (UE) 2023/2631 du Parlement européen et du Conseil du 22 novembre 2023 sur les obligations vertes européennes et la publication facultative d’informations pour les obligations commercialisées en tant qu’obligations durables sur le plan environnemental et pour les obligations liées à la durabilité, JOUE L 2023/263 du 30 novembre 2023
[5] Règlement (UE) 2022/858 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2022 sur un régime pilote pour les infrastructures de marché reposant sur la technologie des registres distribués, JOUE L 151 du 2 juin 2022
[6] Règlement (UE) 2023/1114 du Parlement européen et du Conseil du 31 mai 2023 sur les marchés de crypto-actifs, JOUE L 150 du 9 juin 2023
[7] Directive (UE) 2023/2864 modifiant certaines directives en ce qui concerne l’établissement et le fonctionnement du point d’accès unique européen, JOUE L 2023/2864 du 20 décembre 2023